La grande Halle de la Chambre de Commerce, la même Halle qui avait vu naître un marchand il y avait peu, résonnait à nouveau de l’éclat de nombreuses conversations. Parfois, des rires partaient d’un bout de la salle, montaient jusqu’au haut plafond, qui culminait à plusieurs dizaines de mètres, puis redescendaient se mêler aux discutions de la foule rassemblée là. Une foule, un fouilli de personnes, un méli-mélo de soieries, de toges de velours, une explosion de couleurs qui tantôt se complétaient les unes les autres, tantôt insultaient les yeux et faisaient offense au bon goût par les contrastes qu’elle créaient. Cet inextricable mélange, accompagné du brouhaha lourd et constant que nourrissaient quelques cris deci-delà, ou au contraire les chuchotements de nombreuses personnes ne souhaitant pas révéler leurs affaires, faisaient ressembler la grande Halle à une place de marché, impression renforcée par la quasi absence de plafond qui se perdait au delà de la fumée créée par les pipes des convives.
Toutes ces personnes avaient été invitées là par la Guilde des Marchands, afin de célébrer la centième lune de son existence. Les rumeurs rapportant que la nourriture et la boisson serait présente en grande quantité avaient décidé la plupart des seigneurs ici présents à venir à cette fête. Bien entendu, il y aurait le discours, passage obligé durant lequel ils devraient écouter, ou faire semblant d’écouter Mercure, qui ne manquerait pas de déverser ses lourdes paroles sur une foule qui ne demanderait qu’à s’amuser, mais le bon houblon ADSLien était si divin ... Les rumeurs disaient justement que la Guilde avait ouvert ses caves personnelles pour permettre à tous les invités d’en profiter.
C’est ainsi que la grande Halle fut envahie toute la matinée durant par cette foule bruyante, qui à présent, après avoir vidé la moitié des réserves d’alcools mis à sa disposition, attendait Mercure et Hermès, les co-patrons, avec impatience. Non pas que la perspective du rébarbatif mais inévitable monologue du Maître nain n’ait été particulièrement réjouissante, mais le copieux et pompeux festin qui le suivrait était à présent dans tous les esprits, et déjà les gargouillis de ventres affamés couvraient le bruit des conversations qui s’éteignaient petit à petit pour laisser la place aux scandes de quelques impatients, qui devenaient de plus en plus nombreux au fur et à mesure que le temps passait. Cela faisait déja près de trois heures que la troupe de Marchands avait fait une courte apparition puis était passsé dans la salle de réunion, dans laquelle ils faisaient un bilan sur l’état de la Guilde. Quelques Apprentis se joignirent aux exhortations des convives ; les Apprentis n’étaient pas autorisés à participer aux réunions telles que celle-ci, et devaient patienter au milieu de la foule jusqu’à ce que les Marchands ressortent pour se joindre réellement aux festivités.
La tension montait, de plus en plus de voix se mettaient à scander, espérant accélérer la sortie des Marchands. C’est alors que la porte de la réunion s’ouvrit et qu’en sortit toute l’assemblée, guidée par le nouveau Marchand, Edmund, et fermée par Mercure et Hermès, encore en grande discussion, Mercure agitant ses courts bras en tout sens, tentant apparement d’expliquer quelque chose à Hermès qui n’avait pas l’air d’avoir le coeur à rester suspendu à ses lèvres.
Mercure et Hermes montèrent sur l’estrade. Tout le monde se prépara à la longue séance de torture, mais Hermès, prévoyant, préféra parler le premier, à la grande surprise de la foule, mais également à son grand soulagement.
"Liebe Freunde
Nous sommes ici réunis pour fêter les cent lunes de la Guilde. Cent lunes que notre fière Confrérie dispense son aide à de vertueux seigneurs... moyennant finances, bien sûr. Cette aide fut utile à beaucoup d’entre vous, et je vous remercie de l’avoir accepté. Cent ans également que nous restons neutres dans chaque conflit, je tiens à le rappeler.
Notre sens poussé des biens matériels nous a valu d’attirer la convoitise de biens des seigneurs, et plusieurs fois, certains d’entre eux, des lâches, ont préféré piller nos caravanes plutôt que d’affronter la colère de nos clients. Ceux là, que leurs noms ne soient pas oubliés, et que leurs trésors servent à réparer le mal qu’ils ont fait, ou que leurs crânes soient réduits en poussière et servent de mortier aux murs du tribunal de commerce. "
Sur ce court mais explicite discours, l’elfe à la riche toilette se rassit et laissa la parole à Mercure. Celui-c se leva sur sa chaise pour dépasser le bureau derière lequel ils s’étaient assis. Quelques rires fusèrent, les Apprentis se lancèrent quelques regards complices, mais la salle devint silencieuse lorsque le nain leva la main.
"Liebe Kollegen
Je souhaitai vous remercier d’avoir accepté de participer à cette fête en l’honneur des cent lunes de la Guilde. Je suis ravi de pouvoir partager ce moment avec vous, et je souhaitai également vous parler de quelques petites choses auxquelles j’ai pensé.
Il y a peu, se déroulait l’élection de Miss et Mister Daifen. L’une des question aux participants était : « Que pensez-vous de la conjoncture économique actuelle de Daifen. »
Je pensais que j’avais pour devoir de vous en parler moi-même, profitant de mon immense expérience de tous les aspects économiques de Daifen. En effet, j’ai longuement étudié la montée en puissance de quelques ordres, ainsi que la déchéance de certains autres, tout en gardant mon statut neutre que je me dois d’entretenir. Ainsi, la chute récente de la Morria suite à une mystérieuse épidémie de peste, ainsi que l’ombre dans laquelle est plongée la M&W dont on n’entend plus guère parler, ont laissé le champ libre aux vampires et ont permis au Maglat de revenir sur le devant de la scène, ce qui aura des répercussions à coup sùr sur toute l’économie, l’idéalisme prenant lentement mais sûrement le pas sur le matérialisme. En continuant sur cette logique, vous me direz, « Quel avenir pour les Marchands ? », mais je puis vous assurer que, selon mes estimations le cours de la pièce d’or devrait remonter en flèche d’ici peu, grâce à l’inflation des prix des cerceuils ainsi que des squigs d’élite, la valeur du crucifix étant passé en dessous de la barre des 0.87. Tout ceci ne sera évidemment possible qu’avec une baisse des tarifs d’exportation des bois exotiques de Tropicodhil, qui ne se fera qu’avec le développement de lignes navales très élaborées, tout en prenant gare au respect de la beauté des plages, le marché du cocktail et de la paille remontant en hausse depuis que les mers ne charient plus les nappes de pétrole de la M&W. Cependant, l’augmentation de la fréquentation des plages devra continuer dans le cadre d’un contrôle très stricte, il faudra bien évidemment veiller à ce que le client reparte avec le maximum de plaisir, et de souvenir. Une armée régulière pourrait veiller à ce que les portefeuilles des touristes repartent très allégés, ou ne repartent pas du tout. Bien évidemment, la Guilde sera ravie de vendre les services de soldats pour ces tâches, ainsi que pour l’escorte des navires évoqués plus haut. Passons maintenant à la dégringolade des prix sur la peau de banane. Je vous rapelle que l’inflation continuelle du marché de la tomate a permis à l’usager de s’orienter vers l’orange, or, les producteurs de banane étant financés par les surplus de la vente d’oranges, les fonds suplémentaires obtenus pendant la période transitive ont été reversés dans des installations pour accélérer la production de bananes. Cependant, les producteurs, exhaltés par cette période où le consommateur se jetait sur leurs oranges, ont oublié de prendre en compte le fait que le client se lasse rapidement, et nous nous trouvons donc actuellement avec des stocks d’oranges invendues pourrissant sur place, ce qui ne serait pas si grave, si la même situation ne s’était produite avec les bananes, ce qui a entrainé un sérieux déficit, les bananes étant très chère à produire à cause du pris exorbitant du pétrôle. Or, la Guilde avait misé gros dans le marché de la banane, et voila que les producteurs nous envoient les surplus pour ne pas gaspiller. Des envois ont également été envoyés aux élevages de squig-à-viande, mais il a été découvert trop tard que les bananes transformaient les squigs-à-viande en squigs d’élite. Non seulement, la nourriture normallement fournie par les squigs-à-viande va être remplacée chez le consommateur par la tomate, en plus, il y a maintenant des squigs d’élite dont personne ne sait quoi faire, les producteurs de squigs d’élite n’acceptant pas les squigs venant d’autre part que leurs propres ranchs
..."
Quelques heures plus tard, Mercure stoppa son dicours lorsqu’il fut certain que tout le monde dormait, à l’exception des Marchands, qui avaient cependant du mal à garder les yeux ouverts. Il réveilla l’Apprentie Roseboard et la manda de lui faire un rapport sur la quantité de bière et de petits fours consommés. Quelques minutes plus tard, elle revint des caves et des cuisines.
« 320 litres de schnaps Meister Mercure, und etwa 800 pétits phoûrs »
Hermès s’approcha de Mercure :
« Mercure, mein Freund, fous aurrrriez pû faire bien besser, aber heureusement, fous les affez endormis avant que l’heure der Abendessen n’ai sonné, nous affons très certainement macht eine Gros Wirtschaft..heu...ein Gros..économie. »
En silence, la troupe des Marchands sortit de la grande halle et se dirigea vers les cuisines, où les attendait un véritable festin, laissant un silence aussi lourd que le brouhaha inital planer sur la salle, silence seulement brisé par les ronflements de quelques hères endormis.
Apprenti Marchand Ahriman
Mer 1 Oct - 18:22